Thaidene Nëné – Terre des ancêtres

Auteur

  • IISAAK OLAM Foundation

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Crédit photo : Pat Kane

Glossaire des termes en dënesųłıné

Bet’sı́ghı́
Utsingi Point

Desnethché
Embouchure de la rivière, également Fort Reliance

Łutsël K’é
Nom de la Première Nation des Dénés de Łutsël K’é et de sa principale communauté

Ni Hat’ni Dene

« Gardiens du territoire » (nom du programme des gardiens autochtones)

Nuwe néné, nuwe ch’anıé yunedhé xa

« Notre terre, notre culture pour l’avenir »

Thaidene Nëné

Terre des ancêtres

Tsąkuı Thedá

Lady of the Falls

Merci à Steven Nitah d’avoir fourni l’enregistrement sonore de ces mots et expressions en dënesųłıné

Sommaire

« Notre vision pour Thaidene Nëné1 est la suivante : Nuwe néné, nuwe ch’anıé yunedhé xa (Notre territoire, notre culture pour l’avenir) ». (www.land of the ancestors.ca)

En 2019, la Première Nation des Dénés de Łutsël K’é (Łutsël K’é) a désigné 26 376 km2 (6,5 millions d’acres) de ses terres et de ses eaux, y compris le bras Est de Tu Nedhé (Grand lac des Esclaves) dans les Territoires du Nord-Ouest (T.N.-O.), comme aire protégée autochtone en s’appuyant sur ses propres lois dénées.

« Tout ce que nous avons fait, c’est pour l’avenir. C’est ce que disaient nos Aînés: yunedhé xa, c’est-à-dire pour l’avenir. Tout ce travail est destiné aux générations futures. Nous leur laissons un héritage. » (Darryl Marlowe, chef)

Après plus de 50 ans consacrés à défendre leur territoire et leurs droits comme peuple autochtone, Łutsël K’é a conclu des ententes avec les gouvernements national et territoriaux (Parcs Canada et le gouvernement des T.N.-O.). Dans Thaidene Nëné, ou « Terre des ancêtres » en dënesųłıné, on trouve quatre désignations d’aires protégées :

  1. « aire protégée autochtone », en vertu de la loi des Dénés de Łutsël K’é;
  2. « réserve de parc national » au sens de la Loi sur les parcs nationaux;
  3. « aire protégée territoriale » en vertu de la Loi sur les aires protégées des Territoires du Nord-Ouest (2019) et « aire de conservation de la faune » en vertu de la Loi sur la faune des Territoires du Nord-Ouest.

Thaidene Nëné est une « histoire de réconciliation… Pour Łutsël K’é, la relation au sein de Thaidene Nëné est une expression et un exemple de ce à quoi ressemble la réconciliation à nos yeux ». (Steven Nitah, négociateur en chef de Łutsël K’é pour Thaidene Nëné)

Le territoire traditionnel des Dénés de Łutsël K’é s’étend sur 200 000 km2. Comme le mentionne Steven Nitah, ancien chef de Łutsël K’é et négociateur en chef de la communauté pour Thaidene Nëné, « nous avons un immense territoire et cela entraîne d’immenses responsabilités ». Les habitants de Łutsël K’é entretiennent une relation de longue date avec Thaidene Nëné. Steven Nitah rapporte que « nous veillons de cet endroit depuis des temps immémoriaux ».

Déjà en 1969-1970, Parcs Canada souhaitait protéger ce territoire, ce à quoi s’est opposé le chef de l’époque, Pierre Catholique, par crainte que la création du parc national du bras Est du Grand lac des Esclaves ne restreigne l’accès de Łutsël K’é à son territoire. La communauté a répété ce message à de nombreuses reprises au cours des années qui ont suivi. Face aux pressions liées au développement, Łutsël K’é a cherché à s’associer à Parcs Canada au début des années 2000 pour s’assurer que son territoire serait protégé. Le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest (GTNO) s’est joint à titre de partenaire en 2013.

Thaidene Nëné Xá Dá Yáłtı, qui signifie « ceux qui parlent au nom de Thaidene Nëné » en dënesųłıné, est le conseil responsable de la gestion de l’aire protégée autochtone de Thaidene Nëné.

Un fonds de fiducie de 30 M$ fournit le financement des activités de conservation permettant aux Dénés de Łutsël K’é d’assurer l’intendance à long terme de ce territoire.

Ni Hat’ni Dene, qui signifie « gardiens du territoire », sont des gardiens autochtones qui veillent sur Thaidene Nëné et qui interagissent avec les visiteurs.

Pour en savoir plus, téléchargez le plan stratégique de Thaidene NënéPlan stratégique de Thaidene Nëné (en anglais)

  1. Se prononce THIGH-den-nay NEN-ay
  2. Une aire protégée autochtone (APA) est un type d’aire protégée et de conservation autochtone (APCA). Le terme APA est plus couramment utilisé dans les Territoires du Nord-Ouest.

Le lieu

Cartes : http://www.landoftheancestors.ca/maps.html

Thaidene Nëné est situé sur le territoire traditionnel des Premières Nations de l’Akaitcho, principalement sur le territoire de la Première Nation des Dénés de Łutsël K’é.

Géographie et écosystèmes

Thaidene Nëné comprend le bras Est de Tu Nedhé (Grand Lac des Esclaves), le plan d’eau douce le plus profond (614 m) en Amérique du Nord. Couvrant 26 376 km2 (6,5 millions d’acres), Thaidene Nëné protège un puits de carbone d’importance mondiale dans la zone de transition entre la forêt boréale (taïga) et la toundra arctique.

Paulette 3

Crédit photo : Pat Kane

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Crédit photo : Pat Kane

Lieux d’importance culturelle

Thaidene Nëné protège également des lieux d’importance culturelle pour les Dénés de Łutsël K’é, notamment Tsąkuı Thedá (Lady of the Falls), Bet’sı́ghı́ (Utsingi Point), Ɂedacho Túe (Lac Artillery), et Tsąkuı Thedá Dezé (Rivière Lockhart), et Snowdrift River.

« Les gens abordent la vie de différentes manières. Pour nous, le peuple des Dénés, la vie se déroule près du territoire. Nous aimons notre territoire. Il nous offre une façon de vivre ».

(JC Catholique, membre du conseil de gestion, Thaidene Nëné Xá Dá Yáłtı)

Thaidene Nëné est un territoire important, riche en biodiversité, qui abrite de nombreuses espèces essentielles à la culture des populations autochtones de la région, notamment les espèces ailées, à nageoires, à sabots, les espèces dotées de pattes et les plantes. C’est également un habitat d’hivernage important pour les ɂetthën (caribous) (http://www.landoftheancestors.ca/about.html).

Map of Łutsël K’é Dene First Nation Place Names & Thaidene Nëné Indigenous Protected Area

Overview map of Thaidene Nëné Indigenous Protected Area

Les lois des Dénés de Lutsel K’e et l’histoire de la création de Thaidene Nëné

Thaidene Nëné a d’abord été créé par Łutsël K’é en vertu des lois dénées. Trois lois ont façonné la relation entre Łutsël K’é et Thaidene Nëné.

La première loi

« La première loi consiste donc à protéger [Tsąkuı Thedá]. Elle constitue le cœur de Thaidene Nëné… tout découle d’elle….Thaidene Nëné protège son bassin versant ». (Steven Nitah, négociateur en chef de Łutsël K’é pour Thaidene Nëné)

Écoutez Steven Nitah présenter la première loi en faisant jouer l’enregistrement ci-dessous.

La première loi vise à protéger la zone entourant Tsąkuı Thedá, qui signifie la vieille dame assise dans les chutes (Old Lady that Sits in the Falls) . L’histoire de Tsąkuı Thedá, racontée par Steven Nitah, négociateur en chef de Łutsël K’é pour Thaidene Nëné, commence à Ɂedacho Túe (lac Artillery). Dacho conduit le peuple de Łutsël K’é en direction de Tu Nedhé, à la poursuite de deux castors géants. À mi-chemin de la Tsąkuı Thedá Dezé (rivière Lockhart), le groupe capture l’un des castors géants et la viande est partagée entre les membres du groupe. Une femme âgée demande du sang de castor, mais on lui refuse parce qu’il n’y en a pas assez pour tout le monde.

Le groupe poursuit sa route vers Tu Nedhé (Grand Lac des Esclaves) en suivant le deuxième castor. Arrivés à Desnethché (l’embouchure de la rivière), ils remarquent que la vieille femme n’est plus avec eux, et Dacho envoie deux jeunes coureurs à sa recherche. Ils trouvent la vieille femme au dernier campement. Elle raconte aux jeunes que, en proie au désespoir, elle s’est adressée au Créateur. Après un certain temps, le Créateur s’est manifesté et lui a demandé de se porter volontaire pour rester assise à cet endroit et apporter aux personnes qui lui rendent visite toute l’aide dont elles ont besoin, qu’elle soit physique, émotionnelle ou spirituelle, et ce, pour l’éternité.

Au moment où les jeunes hommes rejoignent la femme, des rochers avaient déjà commencé à s’amonceler autour de ses jambes et de ses bras. Elle leur dit : Tant qu’on me respectera, je resterai assise ici jusqu’à la fin des temps.

À propos de Tsąkuı Thedá : « Cet endroit est spécial… sacré. À chaque fois que m’y rends, je remonte dans le passé. Tout est propre, calme, on y trouve une grande diversité d’espèces. C’est à la fois un rappel et un exemple de la façon dont les choses devraient être non seulement pour nous, mais aussi pour les peuples du monde entier »
(JC Catholique, membre du conseil de gestion, Thaidene Nëné Xá Dá Yáłtı)

À propos de Tsąkuı Thedá : « Je crois qu’elle existe, qu’elle aide les gens qui croient en elle, qu’elle les guérit. Il existe des preuves solides à l’effet que nos ancêtres ont reçu de l’aide dans le passé. »
(James Marlowe, membre du conseil de gestion, Thaidene Nëné Xá Dá Yáłtı)

« Des lieux comme Tsąkuı Thedá nous rappellent qu’il nous incombe encore aujourd’hui de veiller à ce que les êtres à qui nous sommes liés aient un endroit qui soit leur lieu de vie, un environnement sain. »
(Steven Nitah, négociateur en chef de Łutsël K’é pour Thaidene Nëné)

La deuxième loi

La deuxième loi découle de l’orientation fournie par les Aînés et la communauté de Łutsël K’é en vue d’établir Thaidene Nëné. Les Aînés ont mis sur pied l’initiative dans son ensemble et ont guidé sa mise en œuvre. Ils voulaient protéger Tsąkuı Thedá (Lady of the Falls) et le bassin versant de la multiplication des claims miniers résultants de la découverte de diamants sur le territoire de Łutsël K’é.

Les Aînés ont dressé une carte illustrant la zone qu’ils voulaient protéger. Les membres de la communauté ont accepté le tracé et ont nommé cette région Thaidene Nëné. C’est ainsi qu’est née la deuxième loi. Toutes les décisions prises par Łutsël K’é ont été prises par les membres. On a eu recours à des résolutions du conseil seulement au besoin, pour des raisons juridiques.

Avant d’approcher les gouvernements et d’autres partenaires, Łutsël K’é a mené plus de quatre années de consultations auprès de la communauté.

La troisième loi

La troisième loi a été élaborée par les membres de la Première Nation des Dénés de Łutsël K’é. En 2019, les membres ont voté à 88 % en faveur des accords d’établissement.

Une partie essentielle du processus de négociation a consisté à s’assurer que les membres de Łutsël K’é comprenaient les accords et que chaque membre, quel que soit son lieu de résidence, avait la possibilité de voter en faveur ou contre les accords d’établissement de Thaidene Nëné.

« Les membres de [Łutsël K’é] entrevoient de nouvelles possibilités pour l’avenir, un avenir qui ne les oblige pas à faire fi de leur véritable identité ».
(Larry Innes, conseiller juridique)

« Cette vision solidement ancrée a permis à Łutsël K’é, comme communauté, d’atteindre ses objectifs
(Stephen Ellis, conseiller principal)

Écoutez Steven Nitah parler des deuxième et troisième lois en faisant jouer l’enregistrement ci-dessous.

Législation connexe de la Couronne

Législation territoriale

Thaidene Nëné a été la première aire protégée territoriale des T.N.-O. à être désignée en vertu de la Loi sur les aires protégées de ce territoire, qui est entrée en vigueur en juillet 2019. Cette loi a été élaborée avec la participation active des populations autochtones des T.N.-O. Łutsël K’é a été un membre actif et apprécié du groupe de travail technique, qui a joué un rôle essentiel dans l’élaboration de la législation sur les aires protégées.

Cette loi « fournit le cadre législatif pour la protection, la conservation et le maintien de la biodiversité, de l’intégrité écologique et de la continuité culturelle dans les T.N.-O. par la création d’un réseau d’aires protégées permanentes représentatives des écosystèmes et des cultures présents sur le territoire », (GTNO, s.d.).

Cette loi est unique au Canada, car elle reconnaît explicitement le lien entre la continuité culturelle et la protection de la biodiversité. La Loi exige que le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest (GTNO) travaille en partenariat avec les gouvernements autochtones à chaque étape du processus, depuis de détermination des propositions de zones à protéger jusqu’à la négociation des accords d’établissement.

Cette loi contribuera à veiller au respect des priorités en matière de conservation définies dans le document « Territoire en santé, population en santé : Priorités du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest pour la planification du réseau de conservation de 2016 à 2021 » (GTNO, s.d.).

Le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest a également désigné 3 120 km2 supplémentaires de l’aire protégée autochtone de Thaidene Nëné comme aire de conservation de la faune en vertu de la Loi sur la faunedes Territoires du Nord-Ouest.

Au cours du processus de création de Thaidene Nëné, le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest a émis un décret d’inaliénabilité des terres garantissant que les terres visées à des fins de protection étaient soustraites au développement industriel à perpétuité.

Législation nationale

Parcs Canada a désigné une partie de l’aire protégée autochtone Thaidene Nëné comme réserve de parc national en vertu de la Loi sur les parcs nationaux. De nombreux règlements qui découleront de la Loi serviront à protéger la Réserve de parc national Thaidene Nene.

Accords d’établissement

Les accords d’établissement (l’un entre Łutsël K’é et Parcs Canada et l’autre entre Łutsël K’é et le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest) définissent les lignes directrices en matière de gouvernance de Thaidene Nëné. La Première Nation Deninu K’ue, la Nation métisse des Territoires du Nord-Ouest et la Première Nation des Dénés Yellowknives sont également signataires des accords d’établissement.

« Je suis heureux que nous ayons pris l’initiative d’établir des relations avec deux gouvernements. En cette période où les gens se soucient de la réconciliation, nous sommes un exemple pour le reste du pays. » (Darryl Marlowe, chef)

Accords de relations

Les accords d’établissement de Thaidene Nëné sont des accords de relation qui reconnaissent l’autorité de Łutsël K’é dans le maintien de la relation avec Thaidene Nëné. Łutsël K’é continuera d’agir comme intendant, au même titre que le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest et Parcs Canada. Thaidene Nëné est et restera un lieu où les peuples autochtones peuvent exercer leurs droits inhérents, leurs droits issus de traités et leurs droits ancestraux.

« Par l’entremise de Thaidene Nëné, Łutsël K’é rétablit un pouvoir de force avec les gouvernements. » (Stephen Ellis, conseiller principal)

Donner une voix au caribou

L’accord d’établissement conclu avec le gouvernement des T.N.-O. comprend une zone de conservation de la faune qui comprend des aires d’hivernage des caribous. Comme l’accord donne la parole au caribou, l’aire de conservation sera maintenue jusqu’à ce que les caribous fassent savoir qu’ils n’ont plus besoin de cette aire. Pour y parvenir, les connaissances détenues par les Dénés de Łutsël K’é et la science occidentale seront mises à contribution.

Calendrier et principaux jalons

Reproduits et adaptés du site Web Thaidene Nëné: Land of the Ancestors: http://www.landoftheancestors.ca/about.html

Gouvernance

Autochtones-Couronne

« Thaidene Nëné représente un nouveau partenariat historique entre les gouvernements autochtones et publics visant à protéger le patrimoine naturel et culturel et à favoriser le développement économique local. » (http://www.landoftheancestors.ca/)

Thaidene Nëné Xá Dá Yáłti (conseil de gestion)

Thaidene Nëné Xá Dá Yáłti, qui signifie « les personnes qui parlent au nom de Thaidene Nëné » en langue dënesųłıné, est le conseil de gestion opérationnelle novateur qui s’appuie sur un processus décisionnel conjoint et fondé sur le consensus en matière d’intendance et de gestion de Thaidene Nëné. Łutsël K’é, Parcs Canada et le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest (GTNO) nomment des représentants auprès de Xá Dá Yáłti. Comme l’illustre Steven Nitah, les parties « se tiennent côte à côte, sur un pied d’égalité ».

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Source : Thaidene Nene, Land of the Ancestors, 2021

Les personnes qui parlent au nom de Thaidene Nëné

Une fois nommés, les membres du conseil ne représentent plus les parties qui les ont désignés. Ils ne parlent qu’au nom de Thaidene Nëné et de ceux et celles qui ne peuvent se faire entendre. Les trois parties prennent des décisions selon les recommandations formulées par le conseil. Un mécanisme de résolution des différends est en place en vue d’assurer la gestion des conflits. Aucune mesure ne peut être entreprise sur une question litigieuse tant que les parties ne se sont pas réconciliées et ne sont pas parvenues à un accord.

« Le comité a contribué à la protection de la région, des terres, des eaux et des animaux. Nous voulions nous assurer que notre mode de vie ne serait pas perturbé, afin de pouvoir continuer à vivre comme nous l’avons fait depuis des temps immémoriaux ». (Addie Jonasson, membre du conseil de gestion, Thaidene Nëné Xá Dá Yáłtı)

« Nous ne faisons pas de politique au conseil de gestion. Nous agissons conformément à nos responsabilités à l’égard de Thaidene Nëné. » (Steven Nitah, négociateur en chef de Łutsël K’é pour Thaidene Nëné)

Orientations des Aînés

Ce sont les Aînés et le comité consultatif de Thaidene Nëné qui ont suggéré de créer un conseil qui parle au nom de Thaidene Nëné. La relation fondamentale qu’entretient Łutsël K’é avec le territoire et avec sa culture a joué un rôle essentiel dans l’élaboration du modèle de cogouvernance.

« Ce modèle a suscité beaucoup d’intérêt », déclare Steven Nitah, négociateur en chef de Łutsël K’é pour Thaidene Nëné. Il a été élaboré en s’inspirant d’autres modèles de gestion de premier plan, comme le conseil de gestion de l’archipel de Gwaii Haanas à Haida Gwaii (Colombie-Britannique) et d’autres pratiques exemplaires dans le monde entier.

Respect des différents systèmes de connaissances

De multiples systèmes de connaissances orientent l’élaboration des accords de relation ainsi que le travail de Thaidene Nëné Xá Dá Yáłti. Ce point est important, car les conseils de cogestion privilégient généralement les connaissances techniques et administratives au détriment de l’expérience et des connaissances autochtones, qui sont pourtant potentiellement beaucoup plus pertinentes. Au sein de Thaidene Nëné, Łutsël K’é n’a pas besoin de l’autorisation des partenaires gouvernementaux pour mener à bien ses activités.

Participation de la communauté

Les parties sont chargées d’élaborer un projet de plan de gestion pour Thaidene Nëné qui tienne compte des points de vue des trois parties. Thaidene Nëné Xá Dá Yáłti communiquera le plan lors de séances d’engagement communautaire afin de recueillir des suggestions et commentaires.

Fonctionnement

Il est important de souligner que les trois parties assument conjointement les responsabilités liées au fonctionnement. Lorsque le conseil de gestion prend des décisions, les parties doivent travailler ensemble pour décider de la façon de mettre en œuvre les recommandations. Łutsël K’é est particulièrement bien placé pour assumer ses responsabilités opérationnelles. Ni Hat’ni Dene, un programme de gardiens autochtones lancé en 2008, compte déjà des gardiens actifs sur le territoire. La communauté dispose également d’infrastructures et d’équipements.

« Il nous a fallu 50 ans, mais nous avons créé un parc et nous assumons aujourd’hui nos responsabilités comme protecteurs du territoire, à notre manière.”
(Prairie Desjarlais, coordonnatrice du programme Ni Hat’ni Dene)

Possibilités d’emploi et écotourisme

Une étude révèle que la communauté de Lutsel K’e est appelée à bénéficier de possibilités d’emplois générées par Thaidene Nëné comparables à celles qui auraient découlé d’un projet d’extraction de diamants qui, autrement, aurait pu être mené dans l’aire protégée.

Łutsël K’é développe et offre des possibilités d’écotourisme telles que des excursions guidées et des visites culturelles qui améliorent l’expérience des visiteurs, tout en fournissant des emplois intéressants aux membres de la communauté.

Ni Hat’ni Dene

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Crédit photo : Pat Kane

Ni Hat’ni Dene, qui signifie « gardiens du territoire » en langue dënesųłıné, sont les gardiens autochtones de Thaidene Nëné. Créé en 2008, le programme Ni Hat’ni Dene vise à protéger les terres ancestrales des Dénés de Łutsël K’é pour les générations futures.

Les gardiens Ni Hat’ni Dene :

  • protègent et entretiennent les sites culturels;
  • accueillent les visiteurs de Thaidene Nëné;
  • surveillent le territoire (changements environnementaux, visiteurs, sites culturels, etc.);
  • partagent des connaissances – culturelles et scientifiques – avec les jeunes générations.

« Ni Hat’ni Dene signifie gardiens du territoire en langue dënesųłıné. Les gardiens Ni Hat’ni Dene assurent l’intendance de Thaidene Nëné. Par leur présence et les activités qu’ils mènent sur les terres et les eaux, ils font respecter les droits autochtones et l’autorité de la Première Nation de Łutsël K’é dans Thaidene Nëné. Les équipes du programme Ni Hat’ni Dene pratiquent un mode de vie traditionnel axé sur la subsistance, préservent l’intégrité des sites culturels, assurent une surveillance environnementale et interagissent avec les visiteurs de Thaidene Nëné. »
(Thaidene Nëné, Land of the Ancestors, 2020)

À propos du programme Ni Hat’ni Dene : « De savoir que des gens issus de la communauté œuvrent sur le territoire à protéger les eaux, les terres, les animaux et les poissons me procure un sentiment de sécurité. Ils surveillent les gens qui arrivent à Thaidene Nëné. »
(Prairie Desjarlais, coordonnatrice du programme Ni Hat’ni Dene)

« Comme gardien Ni Hat’ni Dene, je suis un modèle pour les jeunes générations. Ça me fait du bien. Ça me fait me sentir spécial. »
(Denecho Catholique, gardien subalterne)

Financement et emploi

Un financement stable, rendu possible par le Fond Thaidene Nëné, a permis au programme d’embaucher quatre gardiens à temps plein tout au long de l’année, ainsi qu’une coordonnatrice de programme à temps plein. Le programme Ni Hat’ni Dene fournit également du travail à d’autres membres de la communauté de Łutsël K’é par l’entremise d’emplois occasionnels (p. ex., surveillants, cuisiniers, mécaniciens, etc.). Łutsël K’é prévoit de doubler le nombre de postes de gardiens à temps plein d’ici 2025.

Rôles et responsabilités

À la demande de la communauté de Łutsël K’é, Parcs Canada et le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest sont responsables de la réglementation et de faire appliquer la loi. Les gardiens Ni Hat’ni Dene mènent des activités de sensibilisation du public à propos des protocoles et des responsabilités des Dénés de Łutsël K’é.

Jeunes stagiaires

Pendant les mois d’été, de jeunes stagiaires (âgés de 18 à 24 ans) se joignent aux gardiens d’expérience de façon à ce que les connaissances soient transmises aux générations futures. Les jeunes acquièrent de nombreuses compétences et les mettent en pratique, notamment en matière de récolte, de navigation, de sécurité, de langue et d’interprétation météorologique. En retour, ils partagent leurs connaissances et leur expertise avec les gardiens.

« Grâce au programme, les jeunes acquièrent une très bonne compréhension de leur rôle et de leurs responsabilités comme intendants de Thaidene Nëné » (Thaidene Nëné, Land of the Ancestors, 2020)

Avantages

Une étude portant sur la valeur générée par les programmes des gardiens autochtones dans les T.N.-O. révèle qu’un investissement de 4,5 M$ dans le programme Ni Hat’ni Dene a entraîné des avantages socio-économiques, environnementaux et culturels équivalant à 11,1 M$ (Social Ventures Australia, 2016).

« …Łutsël K’é est un lieu de développement des capacités qui sont utiles non seulement à la communauté dans le cadre de la mise en œuvre de Thaidene Nëné, mais aussi pour ses partenaires gouvernementaux. »
(Stephen Ellis, 2020)

Fonds de fiducie pour Thaidene Nëné

Comment cela fonctionne-t-il?

Le Fonds pour Thaidene Nëné est un fonds en fiducie de 30 M$ qui permet à Łutsël K’é de s’acquitter de ses responsabilités au sein de Thaidene Nëné. Łutsël K’é, avec le soutien de Nature United, a recueilli 15 M$ auprès d’organismes de bienfaisance, somme qui a ensuite été égalée par le gouvernement fédéral. Le fonds de fiducie est détenu et géré par Łutsël K’é.

Les intérêts annuels et les revenus d’investissement servent à financer les activités de gestion et de fonctionnement. Ces activités comprennent notamment l’administration du programme Ni Hat’ni Dene, le renforcement des capacités et la formation, le développement organisationnel et les investissements dans des initiatives liées à l’économie de conservation, ainsi que les activités visant à soutenir et à promouvoir le mode de vie des Dénés de Łutsël K’é.

Ce mécanisme de financement novateur permet à Łutsël K’é de couvrir les frais liés à l’exercice de ses responsabilités opérationnelles dans Thaidene Nëné, estimés à 1 M$ par an.

Investissements fédéraux et territoriaux

Parcs Canada a accepté de couvrir tout déficit de financement, dans l’éventualité où le rendement du fonds de fiducie était insuffisant. Parcs Canada s’est également engagé à consacrer 32 M$ aux dépenses de fonctionnement de Thaidene Nëné au cours des 12 premières années suivant sa création et 3 M$ annuellement par la suite. Le gouvernement des T.N.-O. prévoit que Thaidene Nëné dépensera au moins 290 000 $ par an au cours des trois premières années suivant sa création.

Administrateurs

Des administrateurs sont nommés et ont pour mandat gérer les investissements du fonds, et Łutsël K’é décide de l’utilisation des revenus dans le cadre des lignes directrices prévues par les accords d’établissement. En fonction du rendement du fonds de fiducie,il est possible que du financement supplémentaire soit disponible. Dans ce cas, les membres de la communauté et les organisations peuvent soumettre des propositions pour examen aux chef et conseil.

Partenariats

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Crédit photo : Pat Kane

Les principaux partenaires de Łutsël K’é dans la cogouvernance de Thaidene Nëné sont le gouvernement du Canada (Parcs Canada) et le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest (GTNO). Thaidene Nëné n’est que l’exemple le plus récent de l’intendance et de la protection assurés par Łutsël K’é à l’égard de la Terre des ancêtres (Land of the Ancestors), une relation de soins et de réciprocité qui remonte à des temps immémoriaux. Łutsël K’é a invité Parcs Canada et le GTNO à être des partenaires dans la protection de Thaidene Nëné.

Łutsël K’é s’est d’abord adressé à Parcs Canada pour trois raisons. Tout d’abord, les Dénés de Łutsël K’é ont conclu un traité avec le Canada, connu localement sous le nom de Traité de 1900 et, à l’échelle nationale, sous le nom de Traité 8. Deuxièmement, Łutsël K’é voulait bénéficier d’une législation en matière d’aire protégée qui serait reconnue à l’échelle nationale et au niveau mondial. Enfin, Łutsël K’é souhaitait développer une économie de conservation, et le tourisme et le marketing sont deux domaines d’expertise de Parcs Canada.

Le gouvernement des T.N.-O. a également été invité à la table des négociations à la suite du transfert de la responsabilité des terres de la Couronne du gouvernement fédéral au gouvernement territorial en 2014 et à l’élaboration par le GTNO – en partenariat avec les gouvernements autochtones, y compris Łutsël K’é – d’une loi sur les aires protégées permettant d’assurer la protection d’une plus grande superficie de Thaidene Nëné.

« Nous avons lancé le projet de Thaidene Nëné pour honorer notre responsabilité. Il faut comprendre que Łutsël K’é a été le chef de file de tout ce processus. Les choix que nous fait qui ont conduit à la relation que nous avons aujourd’hui »
(Steven Nitah, négociateur en chef de Lutsel K’e pour Thaidene Nene)

De nombreux autres partenaires ont joué un rôle essentiel dans la concrétisation de la vision des Aînés concernant Thaidene Nëné, en apportant un soutien administratif, en défendant les intérêts des Aînés et en contribuant à la création du fonds de fiducie pour Thaidene Nëné. Parmi les autres partenaires clés, soulignons Nature United, la Société pour la nature et les parcs du Canada (SNAP), Canards Illimités Canada et l’Initiative de leadership autochtone.

Pressions industrielles et retrait de terres

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« Nous protégeons à long terme le cœur de notre territoire traditionnel des activités de développement. Nous voulons nous assurer que notre mode de vie, notre culture, nos terres, nos eaux et nos animaux seront protégés pendant de nombreuses années. »
(Darryl Marlowe, chef)

Exploitation minière

Les territoires où vivent les Dénés de Łutsël K’é sont riches en minéraux et ont été largement jalonnés par l’industrie minière, notamment à la suite de la découverte de diamants et de métaux précieux dans les années 1990, qui a entraîné un important essor industriel.

Bien que Łutsël K’é ne soit pas opposée à l’exploitation minière – à condition que les projets profitent réellement à la communauté et qu’ils soient menés dans le respect de l’environnement – la communauté était préoccupée par l’étendue potentielle de l’exploitation minière sur son territoire.

« Nous soutenons certains types d’industries parce que nous devons diversifier nos économies et que nos jeunes ont besoin de travailler. Łutsël K’é n’est donc pas opposé au développement. La manière dont le développement est effectué et l’endroit où il est effectué sont des décisions importantes auxquelles nous voulons participer. »

(Steven Nitah, négociateur en chef de Łutsël K’é pour Thaidene Nëné)

En garantissant la protection de Thaidene Nëné en vertu des lois de la Couronne, Łutsël K’é s’est assuré qu’il n’y aurait pas d’exploitation minière ou de prospection minière sur son territoire. L’industrie minière et la Chambre des mines des T.N.-O. se sont opposées à cette décision. Cependant, le soutien croissant de l’opinion publique envers Thaidene Nëné a compliqué la tâche des entreprises et des investisseurs désireux de poursuivre l’exploitation minière et le développement dans cette région.

Premier retrait de terres

En 1970, le gouvernement du Canada a déclaré inaliénables environ 7 000 km2 de terres du bras Est de Tu Nedhé (Grand lac des Esclaves), en prévision de la création du parc national du bras Est. Bien que le parc n’ait jamais vu le jour, les terres sont demeurées inaliénables. Ce premier retrait de terres a empêché les activités de développement au cœur de Thaidene Nëné, assurant ainsi une protection essentielle pendant la grande course au jalonnement des années 1990.

Deuxième retrait de terres

Le retrait de terres d’une superficie de 26 000 km2 supplémentaires, pour un total de 33 000 km2 en 2007, auquel le Canada et le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest ont donné leur appui, a permis d’accroître la superficie des terres protégées durant les négociations concernant Thaidene Nëné.

Durant les négociations, les limites de Thaidene Nëné ont quelque peu changé. Au bout du compte, 26 376 km2 du territoire traditionnel des Dénés de Łutsël K’é ont été protégés.

Traités et accords

Les accords d’établissement de Thaidene Nëné conclus par Łutsël K’é, Parcs Canada et le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest sont des ententes contractuelles légales. Ils ne constituent pas un traité moderne ou une revendication territoriale; Łutsël K’é, ainsi que les autres Nations membres du gouvernement du territoire de l’Akaitcho, demeure à la table des négociations.

Toute entente de revendication territoriale ou tout traité moderne éventuels que pourraient conclure Łutsël K’é s’appliquera à Thaidene Nëné. L’accord d’établissement conclu avec Parcs Canada définit les zones que Łutsël K’é désignera probablement comme des terres visées par un titre ancestral par l’entremise du processus de revendication territoriale ou de négociation des traités modernes.

Traité de 1900 (Traité 8)

Les Aînés de la communauté ont mandaté l’équipe de négociation pour Thaidene Nëné de « respecter l’esprit et l’intention avec lesquels [Łutsël K’é] a conclu le traité et construire une relation qui soit conforme à cette relation fondée sur ce traité. Ainsi, pour nous, [Thaidene Nëné] est la première manifestation de la de mise en œuvre du traité… tel que nous l’avions envisagé : partager les terres et en tirer profit ».

(Steven Nitah, négociateur en chef de Łutsël K’é pour Thaidene Nëné)

Le 25 juillet 1900, les Dénés de la région de Tu Nedhé (Grand lac des Esclaves), y compris les Dénés de Łutsël K’é, signent le Traité de 1900 (Traité 8) avec la Couronne, bien que les parties aient des interprétations différentes des conditions du traité. Pour Łutsël K’é, l’accord porte sur le partage des terres et des ressources, sur la possibilité de continuer à en tirer profit et sur la nécessité de continuer à agir conformément à leurs responsabilités à l’égard de leur territoire.

Depuis 1992, les Premières Nations de l’Akaitcho, qui comprennent la Première Nation Deninu Ku’e, la Première Nation des Dénés de Łutsël K’é, la Première Nation de Smith’s Landing et la Première Nation des Dénés Yellowknives – Dettah/Ndilo, négocient de nouvelles dispositions particulières visant à actualiser le Traité de 1900 (Traité 8), notamment en ce qui concerne l’autonomie des Premières Nations de l’Akaitcho.

« Le rêve de Thaidene Nëné a toujours été présent dans l’esprit de notre peuple. Si l’on remonte à la signature du Traité 8 en 1900, on peut entendre les mots suivants : tant que le soleil brillera, que l’herbe poussera et que les rivières couleront, nous protégerons notre territoire traditionnel. »
(Iris Catholique, gestionnaire pour Thaidene Nëné)

Autres ententes

À la suite de l’établissement de Thaidene Nëné en août 2019, (Gouvernement du Canada, 2020), Parcs Canada a signé les ententes suivantes :

  • Entente pour la création d’un parc national entre le gouvernement du Canada et la Première Nation des Dénés de Łutsël K’é
  • Entente sur les répercussions et les avantages entre le gouvernement du Canada et la Nation métisse des Territoires du Nord-Ouest
  • Protocole d’entente pour la création de la réserve de parc national du Canada Thaidene Nene entre Sa Majesté la Reine du chef du Canada et le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest (également connu sous le nom d’accord de transfert des terres)
  • Denesoltiné, une entente entre l’Agence Parcs Canada et la Première Nation Deninu K’ue
  • Entente de principe entre le gouvernement du Canada et la Première Nation des Dénés Yellowknives (in absentia)
    • En septembre 2020, le gouvernement du Canada et la Première Nation des Dénés Yellowknives ont signé l’entente finale.

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